Il y a 15 ans, les entreprises connaissaient le même engouement pour le groupware que celui qu’elles connaissent actuellement pour le « social computing » dit 2.0.
Elles mirent en place Lotus Notes, l’outil novateur de Lotus IBM qui fut ensuite parfois remplacé par SharePoint..
Curieusement, les riches enseignements de cette longue ère groupware (ou collaboartif d’entreprise) ne semblent guère être aujourd’hui pris en compte pour le développement du « social computing 2.0 ».
Pourtant, dans les années 85 à 95 le groupware fut aussi une révolution, car les outils de communication et collaboration n’étaient précédemment composés que du simple mail ascii et pour, quelques rares adeptes, de newsgroups.
Pour ne pas rejouer l’histoire, qu’ont donc démontré pendant 10 ans (95 à 2005) l’ « expérience groupware » et sa révolution qui depuis s’est un peu refroidie ?
Voici quelques-uns des enseignements qui me viennent à l’esprit, au delà des nécessaires communication, et accompagnement au changement :
- Les entreprises développement une collaboration pour leurs employés si celle-ci (et seulement si) celle-ci sert son « business » (pour le privé) ou sert sa qualité de service / productivité (pour le public)
- Les entreprises attendent des résultats quantifiables rapidement démontrés par ces outils collaboratifs, notamment parce qu’une part du travail des collaborateurs se fera via ces outils, or ce nouvel usage ne doit pas « couter » plus qu’il ne rapporte (en débats et échanges stériles, par exemple)
- Le collaboratif se base sur des outils (bien sur), mais surtout sur deux autres facteurs qui n’existent pas dans l’usage personnel : le management et les processus, propres aux entreprises.
- Si le management n’incite pas à l’usage des outils collaboratifs, et si les processus n’imposent pas la collaboration, celle-ci aura deux dérives :
- d’abord, la collaboration partira en vrille : débats, échanges, partages… partant dans tous les sens et s’éloignant du but attendu par l’entreprise (voir l’actionnaire) si le management ne participe pas et n’encadre pas. Ce qui n’est pas si simple car la collaboration doit "prendre" naturellement sans trop de regard ou de censure du management.
- ensuite, elle peut mourir si il n'y a pas un accompagnement de ces fondamentaux, notamment un rappel constant des buts et objectifs du management et de sa foi en ces outils.
- Les outils n’apportent en rien du collaboratif si ce dernier n’existe pas déjà en préalable dans l’organisation. En gros, si l’organisation privilégie l’individualisme au détriment du travail d’équipe (en terme d’organisation, de mesure de résultats, …), les outils ne vont pas s’imposer et faire des miracles. En revanche, ils seront adoptés aisément si les individus discutent ou œuvrent déjà en groupes, en réunion, en groupes d’experts identifiés.
Bref, les promoteurs des outils de « social computing 2.0 » doivent je pense tirer parti de ces enseignements.
Car si ils ne démontrent pas l’apport des outils 2.0 en termes de valeur ajoutée aux entreprises, et si les entreprises ne font pas un pas vers des évolutions organisationnelles…. Je pense qu’il existera alors un risque de dégonflement de la « bulle des outils 2.0 » en entreprise dans les mois ou années qui viennent… tout comme il y eut un certain dégonflement de la « bulle » groupware.
Car si ils ne démontrent pas l’apport des outils 2.0 en termes de valeur ajoutée aux entreprises, et si les entreprises ne font pas un pas vers des évolutions organisationnelles…. Je pense qu’il existera alors un risque de dégonflement de la « bulle des outils 2.0 » en entreprise dans les mois ou années qui viennent… tout comme il y eut un certain dégonflement de la « bulle » groupware.
En effet, sur 100 entreprises qui se lancèrent dans l’aventure groupware, à peine 10% implémenta réellement dans la durée des outils et des processus réellement collaboratifs.
Notons que cela ne remet pas en cause l’impact, l’usage, le développement et le succès des prodigieux outils de social computing 2.0 dans la sphère privée. En effet, quoi de plus plaisant que d’échanger et de « collaborer » librement, de manière volontaire et désintéressée avec des amis au sein de communautés partageant les mêmes intérêts, les mêmes passions, les mêmes recherches.
Malheureusement, les entreprises ne s’encombrent guère de valeurs philanthropiques, d’échange, de débat, de volontariat, de désintéressement. Hormis celles dont le métier est l’innovation, le conseil, la R&D et qui se doivent d’entretenir la réflexion et l’échange propre à la réflexion ou la création, ... leur grande majorité recherche l’impact business / productivité immédiat.
Je pense donc que toute démarche de mise en œuvre d'outils de social computing doit s’accompagner, comme ce le fut pour les bons projets groupware, d’une démarche d’analyse autour de l’information : qui participe, avec quel rôle, sur quelle information, dans quel processus, avec quel participation / contrôle du management, dans quel but et R.O.I. en objectif, avec quel outil de mesure de résultat.
Pour percevoir certains enjeux et règles du groupware, je reporte à l’excellent article de 1994 « GROUPWARE AND SOCIAL DYNAMICS: EIGHT CHALLENGES FOR DEVELOPERS de Jonathan Grudin, toujours d’actualité 16 ans plus tard (il y en a bien d’autres sur ce thème)..
Extrait ci-dessus, le groupware est situé comme « liant » entre les applications main-frame d'entreprise et l'utilisateur de micro, tout comme le social computing peut l’être aujourd’hui.
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