mardi 15 mars 2011

Les trois grands défis distincts de Microsoft face au séisme du Cloud.


Microsoft doit son nom à « micro / soft », « logiciel(s) pour micro-ordinateur(s) » et Windows doit son nom au multi-fenêtrage, contrôlé à la souris.
Or ces micro-ordinateurs avec fenêtres et souris voient actuellement leur monde vaciller avec l'avènement de la nouvelle ère internet 2.0 qui fait la part belle au cloud, aux applications de « social computing », aux connexions haut-débit sans fil et aux tablettes.

L'offre de l'éditeur de Redmond ne pourra donc faire qu'évoluer drastiquement dans les prochaines années. Car cette ère 2.0 vient modifier les fondamentaux de la "micro informatique", à savoir le PC lui-même, issu d'une idée : disposer d'un ordinateur personnel pour réaliser des traitements locaux avec des logiciels locaux.

Ces dernières années, Steve Ballmer a bataillé ferme pour tenir la position de leader de la firme.
Ses possibles successeurs en feront-ils autant ? Les réponses sont distinctes pour chaque grand segment adressé par Microsoft.

Quels sont-ils ?
Indépendamment des domaines « hors informatique d’entreprise » que sont les jeux (avec la X-Box) et la téléphonie (avec les smartphones Windows Phone), l'offre professionnelle de Microsoft se divise en 3 grands domaines, assez scindés au final. Ils sont comme des plaques tectoniques qui dérivent lentement côte à côte et qui génèrent de temps à autre quelques séismes près des failles et des zones de frottement.

Les 3 grands « continents » de Microsoft sont :
  1. Les logiciels pour le développement d'applications
  2. Les outils de productivité personnelle autour du poste de travail
  3. Les logiciels pour serveurs d'infrastructure

1. Les logiciels pour le développement d'applications

Suite au succès des Basic, Visual Basic, Visual Studio et le langage .NET se sont imposés. Aujourd'hui, avec le Framework .NET, les services Web XML, le Visual Web Developer le langage initialement « micro » s'est orienté Web.
La concurrence avec le monde libre et le monde Web d'IBM a bien été « tenue ».

Mais le défi de Microsoft va être désormais de pousser les entreprise à développer des applications qui pourront rapidement évoluer vers un modèle « ASP / Cloud » et ce, sous l'environnement Windows Azure, souvent greffé à SQL Azure (se voulant le nouveau standard de la base de donnée hostée).
Certes, les datacenters apportent clairement beaucoup aux développeurs en termes de plates-formes de test, de puissance de calcul, etc... ainsi qu'aux entreprises en terme de calcul, de disponibilité, etc… mais l'évolution sera néanmoins une révolution pour les développeurs.

A l'autre bout de la chaine du « frontal web new style », il y a Silverlight l'alternative de Microsoft à Flash d'Adobe, qui a toujours bien du mal à percer. La sortie d'HTML5 assombri même son avenir. Les smartphones sous Windows Phone 7 et d’ hypothétiques tablettes sous Windows 8, plus un essor de fonctions 3D, pourront lui donner une dernière chance.

Microsoft ne peut se permettre de dévisser de sa position de leader des outils de développement de « présentation » pour le frontal client d’entreprise, car un rôle de fournisseur des seules solutions back-office est moins visible (surtout à l’heure ou les clients « PC Windows » commenceraient à régresser vers de nouveaux types de clients aux nouveaux usages).


2. Les outils de productivité personnelle autour du poste de travail

Le poste de travail équipé de Windows et d'Office (intégré OEM ou sous contrat volume pour les entreprises) est LE standard depuis 15 ans.

Ce couple « uni pour la vie » est encore la principale source de revenus de Microsoft.

Une « cash-machine » qui devra cependant vite se évoluer car l'offre Cloud, les outils Web 2.0 et les tablettes arrivant plus nombreux chaque mois ne donne guère d’avenir à ce modèle, mais bien au contraire tend à le combattre farouchement.

Le couple « semi-hosté »Windows 8 et Office 365 viendra vite proposer une évolution (dans la continuité) en ce sens, mais la migration du parc mondial de PC va-t-elle s’opérer ?

Plusieurs facteurs faciliteront une migration « chez le même éditeur » (ou la stagnation) pendant encore des années car les alternatives vers la concurrence resteront hasardeuses :
  • les modèles de licences déjà acquises favoriseront l'évolution
  • la base installée « captive » de PC fera que les utilisateurs penseront d'abord évoluer (à service rendu équivalent) vers les versions suivantes des deux logiciels phares (dans leur version hostée ou non), et non vers un « Web PC » sous ChromeOS de Google ou autre WebOS d'HP.
  • le grand parc d'applications d'entreprise actuelles exigera encore longtemps de garder un pied sur l'OS local, car celles-ci sont liées aux technologies qui les ont vus naître (même si la virtualisation décolle un peu ce pied du rocher)
  • les habitudes acquises pour longtemps. Quoique ce n’est pas si simple. On l'a vu avec l'adoption parfois difficile du ruban différenciant Office d'OpenOffice. Et inversement, l'adoption parfois très rapide de nouveaux usages comme l'iPhone ou iPad, conçus nativement pour consommer des services Web.
Car en effet, une révolution du poste de travail s'annonce bien.
Pour la génération iPhone, l'écran multi-touch et les applications cloudifiées sont devenues la norme. Bientôt la tablette sera le client naturel, et le « service rendu à l'utilisateur » pourrait être totalement revu (cf : l'explosion de l'iPad et son changement de paradigme : masquer totalement l'informatique / consommer avant tout du Web).

Microsoft doit donc aussi s'engager sur le marché des tablettes, mais avec quel OS ? : un nouveau système « simple, innovant et rapide » (avec de nouvelles applications et des anciennes virtualisées), partagé avec les Smartphones et tablettes... ou un « modéré » plus lourd, restant compatible avec 15 ans de Windows ?

La firme tentera surement un compromis, mais celui-ci sera-t-il gagnant face aux « web pure players » partant de zéro ?
La discrète, récente et symbolique bataille perdue d'Internet Explorer face à de « petits » concurrents comme FireFox démontre que le monde du Web, à la différence de celui de la bureautique, est un univers bien plus concurrentiel.

Il faudra que Microsoft œuvre aussi pour garder ses constructeurs "alliés historiques" si le marché change rapidement vers de nouveaux terminaux Web. Le CEO de HP vient de déclarer que chaque PC de la firme pourrait désormais être proposé sous Windows ou une alternative WebOS. 

Enfin, les succès d'outils de développement Microsoft innovant sur le Web 2.0 sera le meilleur appui à l'évolution du monde du poste de travail “évoluant”, quel qu'il soit.


3. Les logiciels pour serveurs d'infrastructure

Là, pas de débat, la concurrence a été anéantie depuis l'arrivée de Windows NT il y a 15 ans, même les multiples Unix furent mis dans les cordes.

Aujourd'hui, Active Directory, Exchange, TSE/RDS, SQL Server, SharePoint, SCCM, ... règnent en maîtres.

A l'exception d'Oracle, leurs alternatives (comme des DB2, Notes Domino, LanDesk, Citrix, …) tentent de survivre, ou n’ont pas survécus comme Novell.
Ce succès est du au fait que disposer de logiciels d'infrastructures simples, ergonomiques, cohérents, bien intégrés et avec une pérennité claire est primordial pour les entreprises.

Seule l'ère de la virtualisation dominée par VMware est venue un peu troubler cet ordre établi, mais avec un grand contrôle de Microsoft.

Aujourd'hui pour l’éditeur : ce « continent » dispose d’un ciel quasi sans nuages.

Mais que peut venir chambouler le Cloud dans cette quiétude ?
L'évolution Cloud va venir forcément « impacter » les services d'annuaire, de partage de fichier, de gestion base de donnée, de messagerie, … en les migrant vers des environnements hostés, là où le choix des offres pourra être bientôt bien plus « ouvert » et concurrentiel.

Microsoft va donc rapidement faire la promotion de ses services d’infrastructure à succès vers leur équivalent Cloud, mais leur avenir sera alors fortement lié à l'avenir du monde bureautique « PC Windows / Office » qui leur serait lié (d'où l'intégration grandissantes de fonctions d'infrastructures serveur dans Windows 7 comme l'accès sécurisé, le monitoring ou la virtualisation).

Plus ce couple du poste de travail sera « touché » par la révolution Cloud en terme de part de marché.... plus les logiciels d'infrastructures en paieront le prix. En revanche, si Microsoft gagne son évolution vers des produits et logiciels clients modernisés, plus l'avenir des logiciels d'infrastructure (et développement) sera encore assuré pour de nombreuses années.

Autant dire que l'évolution du poste client Microsoft et son impact, notamment face à la vague des tablettes, seront décisives pour l'éditeur dans les deux prochaines années.

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